La victime mise en scène: Représenter le traffic à des fins d’exploitation sexuelle
Migrations et Société, 2009, 21(126): 127-141 / Revista de antropología social, 2009, 18: 297-316 / T. Zheng (ed.). Anti-Trafficking, Human Rights, and Social Justice. New York: Routledge, pp: 134-149
Cet article prend pour objet l’exploitation sexuelle infantile en Asie du Sud-Est en analysant la représentation victimisante et fortement émotive du mineur vendu pour la prostitution. La construction sociale dont fait l’objet ce phénomène depuis le début des années 1990 est le résultat d’une stratégie réfléchie de la part des organisations non gouvernementales et des acteurs institutionnels engagés dans la lutte contre ce qu’ils estiment comme étant un « fléau intolérable ».
La représentation de la victime souligne son innocence ainsi que l’injustice inhérente à sa tragédie. Elle met également en scène la souffrance corporelle et les différences culturelles. Cette représentation s’inscrit dans une politique de la pitié, définie par Luc Boltanski comme étant l’observation à distance d’un malheureux par un spectateur. A ce tandem s’ajoute un tiers agent, bienfaisant ou bourreau, dont la fonction est de renforcer l’indignation et le conséquent appel à engagement du spectateur. Ces représentations ne seraient vraies qu’en partie, la réalité des parcours des dites « victimes » n’étant pas toujours aussi caricaturale.