L’exploitation de la sexualité des femmes par leur famille au Vietnam: Financer les chocs exogènes et le crédit informel
Autrepart, 2014, 66: 133-152
Cet article examine l’intrication entre choc exogène, crédit informel et exploitation de la sexualité des femmes par leur famille au Viêt Nam. La recherche sur la prostitution défend la thèse causale selon laquelle la pauvreté et l’endettement des ménages mènent à la prostitution des femmes. Or, les travaux définissent rarement le concept, en outre les ménages visés par l’enquête n’entrent pas dans la catégorie des ménages pauvres au sens où l’entend le gouvernement vietnamien. Si les revenus suffisent en général à couvrir les dépenses essentielles, ils manquent pour constituer un capital antichoc. Confrontés à l’imprévu, les ménages doivent trouver des revenus substantiels. Faute de pouvoir constituer de l’épargne, l’exploitation de la sexualité apparaît comme une option rationnelle au regard de sa profitabilité et souplesse. Une autre solution consiste à s’endetter. Les prêteurs privés profitent de l’exclusion de la finance formelle des segments plus vulnérables de la population pour vendre leurs produits financiers. Si le ménage empruntait pour parer à un choc, il risque de devoir emprunter pour financer le coût élevé du crédit. Il peut à nouveau privilégier l’exploitation de la sexualité de ses filles, fonder son espoir sur la rencontre d’un généreux protecteur lié à une d’entre elles, ou recourir au système de la caution individuelle.